Olivier DURIFF

Au seuil des années 70, nous recherchons localement d’éventuelles traditions vocales, instrumentales contées ou dansées auprès d’anciens chanteur-ses, musicien-nes, conteur-ses, danseur-ses…

Au-delà d’un important répertoire musical et chorégraphique mis à jour, c’est toute une façon originale de pratiquer la musique, de la partager et de se la transmettre que nous découvrons sur le territoire d’un grand Massif Central.

Dans ce monde resté à l’écart des codes d’apprentissage académique de la musique, on joue de la « routine », un mot qui laisse mal entrevoir aux non-initié-es l’espace de liberté sonore et mélodique qu’il recouvre et de singularité à laquelle chaque interprète a droit, quelque que soit sa virtuosité et son expérience. 

Dans les mois et années qui suivent et jusqu’à aujourd’hui, avec l’ambition de faire mieux connaître ces découvertes et ces auto-pédagogies, nous proposons alors de re-transmettre à nouveau ces musiques et ces expressions. Certains s’en emparent, forts d’une pratique savante de la musique, reconstituant objectivement les airs et mélodies enregistrées, quand d’autres — j’en suis — observent plus en amont les conditions et les modalités d’apprentissage qui ont prévalu pour ces anciennes pratiques et les remettent en pratique. L’oralité de la transmission, la corporéité et la sensibilité de chacun sont au cœur de la transmission et de la réception.

« Je me suis appris tout seul en regardant les autres » est la phrase récurrente de ces apprentissages: « s’apprendre », en « regardant » et en sollicitant ses propres énergies, intelligence et sens de l’observation dans un monde où les droits d’auteur ne sont pas (encore!) de mise et où la fidélité mémorielle de chacun-e n’implique pas obligatoirement le clonage intégral de la mélodie des autres…

Bref un monde de liberté d’expression engrangée dès le plus jeune âge dans des pays et à une époque où tout le monde chante, parle, crie à longueur de journée, accessoirement danse, s’exprime corporellement par tous les moyens à sa disposition sans autre regard ni autre jugement de valeur que celui de sa communauté de vie. 

Une modeste leçon d’expression de chacun-e venue, autant qu’on puisse l’entrevoir aujourd’hui, de nombreux siècles de pratique, édifiant pour qui ne sait plus aujourd’hui à quel chant se vouer! 

Une ouverture vers une autre façon d’envisager l’éducation et la transmission des arts du monde. 

Je vous en parle…