1. Du “Bon gouvernement” et du “Vivre Bien” – Alfredo Gomez-Muller
Il est des crises dont la profondeur peut, parfois, inciter à écouter les « autres », ceux qui parlent, pensent et vivent autrement que nous le faisons. Ainsi, à l’époque de la première expansion de la « modernité » capitaliste et colonialiste, l’expérience du « bon gouvernement » (buen gobierno) des incas, décrite en particulier par l’Inca Garcilaso de la Vega, contribue de manière significative au renouvellement de la pensée politique et des théories sociales et économiques en Europe, et notamment en France. De nos jours, les politiques « indiennes » andines du « Vivre Bien » (sumak kawsay, suma qamaña), qui se rattachent en partie aux mémoires anciennes du « bon gouvernement », élaborent la critique d’un modèle hégémonique de « civilisation » considéré écologiquement insoutenable et socialement insupportable, et esquissent des modèles alternatifs qui sont l’objet d’importants débats en Amérique « latine » et ailleurs.